Robert Doisneau, Les petites filles du bateau, Île de Ré, 1945. © Atelier Doisneau

Cet automne, les Éditions Glénat et le Couvent Sainte-Cécile nous invitent à suivre Robert Doisneau lors de ses pérégrinations sur les côtes françaises où il fit régulièrement des reportages photo, des années 1930 aux années 1960.

Habituellement, un livre consacré à une exposition voit le jour grâce à l’exposition elle-même. Cette dernière est à la fois son sujet et sa raison d’être. Mais il arrive parfois que ce soit exactement l’inverse, lorsqu’un projet éditorial donne naissance à une exposition qui devient son prolongement naturel, comme une translation de l’œuvre du papier au mur, pour toucher un autre public – ou le même, curieux de découvrir les tirages de ses propres yeux.

Rien ne vaut l’observation attentive d’un tirage, qu’il soit original, vintage ou réalisé à l’occasion d’une exposition. Fort heureusement, les livres offrent des reproductions fidèles des photographies, pour le plus grand bonheur des bibliophiles et des amoureux de l’image. Aussi les livres demeurent-ils des médiateurs privilégiés entre les œuvres et le public.

Robert Doisneau, Hôtel de Paris à Monte-Carlo, 15 octobre 1962. © Atelier Doisneau

Le livre

Robert Doisneau a photographié l’humanité tout au long du XXe siècle, saisissant le quotidien avec humour, grâce et poésie, portant aussi un regard critique et distancié sur son époque. Sa carrière l’a amené à photographier régulièrement la mer et surtout les hommes, les femmes et les enfants qui vivent et travaillent sur les côtes françaises ou y passent leurs vacances.

Car c’est avant tout l’humain que montre Doisneau, fidèle au mouvement français de la photographie humaniste qu’il a contribué à faire rayonner. La mer n’est ici finalement qu’un des cadres, parmi d’autres, du « spectacle gratuit et permanent de la vie quotidienne », selon ses propres mots.

L’ouvrage propose de belles reproductions de la sélection effectuée par l’Atelier Doisneau, un corpus de plus de 80 clichés représentatif de la diversité des sujets traités par le photographe en bord de mer. Les textes de présentation mettent en contexte ces travaux de commande.

L’auteur, Angelina Meslem, historienne de la photographie, résume avec efficacité la carrière de Doisneau et son rapport à la photographie d’illustration. Elle brosse en outre un panorama de l’histoire de la photographie maritime, évoquant le travail d’autres photographes tels que François Kollar, Anita Conti, Jean Dieuzaide et Jean Gaumy.

Cet ouvrage est le deuxième édité par Glénat sur les photographies de Robert Doisneau. Le premier explorait la thématique des Alpes dans l’œuvre du photographe. Publié en 2012, il était aussi accompagné d’une exposition, au musée de l’Ancien-Évêché à Grenoble. Espérons que ces collaborations éditoriales/muséales se poursuivent !

Robert Doisneau, Pêche aux sardines, La Turballe, 1956. © Atelier Doisneau

L’exposition

Le livre trouve un beau prolongement au Couvent Sainte-Cécile à Grenoble. Les images exposées, issues de la sélection de photographies du livre, montrent la variété des commandes passées à Robert Doisneau : reportage pour la presse, édition, illustration.

Le parcours de l’exposition tire parti des beaux espaces du Couvent Saint-Cécile, bel édifice patrimonial grenoblois restauré par les Éditions Glénat, qui en ont fait leur siège social. Deux thématiques sont présentées dans un premier temps, la pêche et le tourisme balnéaire.

Enfin, on peut voir dans la chapelle un florilège des photographies maritimes de Doisneau, « volontairement surprenantes car inattendues et éloignées des images connues », selon les mots de la commissaire de l’exposition et auteure du livre, Angelina Meslem.

En tout, ce sont 80 tirages, souvent inédits, qui illustrent le talent de celui qui se qualifiait lui-même de « pêcheur d’images » et qui affirmait même avec malice : « En vérité ma vraie passion est la pêche à la ligne, la photographie n’est que mon violon d’Ingres. Mais pour tout dire la pêche n’est pas tellement différente de la photographie. »

Robert Doisneau, Sans titre, La Baule, août 1959. © Atelier Doisneau

L’Atelier Doisneau

Selon les filles de Robert Doisneau, Annette Doisneau et Francine Déroudille, « le danger pour une collection de photographies est qu’elle ne s’endorme quand le photographe n’est plus là pour mener ses projets ». « Contrairement à l’œuvre d’un peintre ou d’un sculpteur, qui existe définitivement et peut-être exposée telle quelle, celle d’un photographe ne peut continuer à vivre que si on continue à reproduire ses images, à inventer de nouveaux supports pour leurs présentations, à travailler à leur diffusion », poursuivent-elles.

Installé à Montrouge, dans l’appartement où Robert Doisneau avait travaillé pendant plus de 50 ans, l’Atelier conserve 450 000 négatifs numérotés et archivés selon un classement thématique mis au point par le photographe.

Créé et dirigé par les filles de Doisneau, l’Atelier n’est pas seulement un centre de conservation. Ses dirigeantes l’ont en effet conçu dans le but d’ouvrir la collection au plus grand nombre par l’organisation d’expositions et l’édition de livres.

En outre, de nombreuses photographies sont publiées sur le site Internet de l’Atelier Doisneau, qui est régulièrement enrichi par de nouvelles images, souvent inédites, présentées sous forme de portfolios.

Robert Doisneau, Le ponton, baie de Toulon, août 1949. © Atelier Doisneau

L’exposition : Allons voir la mer avec Doisneau, jusqu’au 19 janvier 2019 au Couvent Sainte-Cécile. Commissariat : Angelina Meslem, historienne de la photographie, responsable de l’Unité de documentation du Service des musées de France.

À lire : Allons voir la mer avec Doisneau, par Angelina Meslem et Atelier Doisneau, Grenoble, Éditions Glénat, 2018.

En ligne : Sur le site de l’Atelier Doisneau, 51 portfolios d’une quinzaine d’images chacun.

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